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Yémen : « Je suis choqué par la diversité de la contamination »

Mines et autres armes
Yémen

Après 7 ans de guerre, le Yémen est fortement contaminé par les mines, les restes de bombes, etc. HI lance une campagne pour sensibiliser la population au danger.

Forte destruction à Aden, dans le sud du Yémen. La guerre au Yémen, qui dure depuis 7 ans, a provoqué la plus grande crise humanitaire au monde. Le niveau de destruction des infrastructures par les bombardements et les tirs massifs dans les zones peuplées, ainsi que la contamination par les engins explosifs sont des défis énormes à relever.

Forte destruction à Aden, dans le sud du Yémen. La guerre au Yémen, qui dure depuis 7 ans, a provoqué la plus grande crise humanitaire au monde. Le niveau de destruction des infrastructures par les bombardements et les tirs massifs dans les zones peuplées, ainsi que la contamination par les engins explosifs sont des défis énormes à relever. | ©Isna Agency / HI

Douglas Kilama, expert en éducation aux risques chez Handicap International, explique l’impact des armes explosives sur les civils au Yémen.

 

Quelle est l'étendue de la contamination au Yémen ?

On ne peut pas avoir une idée précise ou même une estimation de la contamination, en raison des combats actuels et de l'impossibilité de collecter des données. Mais le Yémen est considéré comme l'un des pays les plus contaminés au monde.

Je suis choqué par la diversité de la contamination ici : mines, engins improvisés, munitions explosives abandonnées, bombes non explosées, armes à sous-munitions, etc. L'ampleur de la contamination par les mines improvisées, notamment, est incroyable. L'analyse de quelque 2 400 engins explosifs improvisés (EEI) depuis 2017 a révélé que 70 % d'entre eux font office de mines : c'est-à-dire qu'ils sont déclenchés par la présence, la proximité ou le contact d'une personne ou d'un véhicule.

La contamination est particulièrement forte le long de la côte ouest du Yémen, près du port stratégique de Hodeida, dans le gouvernorat de Taiz et plus récemment autour de Marib, foyer d'intenses combats en 2020. Ces mines sont utilisées de manière traditionnelle : afin de ralentir ou de bloquer la progression des forces ennemies ou de protéger un point stratégique. Nous avons également reçu des rapports sur des mines marines, dont des mines marines improvisées à Mokha et Hodeida. Les civils sont toujours les premières victimes de cette contamination.

 

Comment les engins improvisés sont-ils produits ?

Il existe d'importants stocks d’engins explosifs, parfois abandonnés, au Yémen. Ils peuvent être utilisés comme matière première pour produire des engins improvisés. Ensuite, les bombardements aériens ou les restes de bombes explosées peuvent également être récupérés comme matière première pour produire des engins explosifs. Mais les parties aux conflits armés ne sont pas les seules à utiliser des mines. De récents experts de l'ONU indiquent que les groupes criminels utilisent de plus en plus d'engins improvisés.

 

Où et comment se produisent les incidents liés aux mines ?

Le UN Humanitarian Needs Overview for Yemen publié par les Nations unies fait état de 1 300 civils « touchés par des incidents liés aux mines antipersonnel ou aux restes d'explosifs » en 2020. La plupart des accidents se produisent pendant les activités quotidiennes : aller chercher de l'eau à un puits, cultiver un champ ou s'occuper du bétail, utiliser des infrastructures publiques telles que les routes, les bâtiments, des écoles ou des établissements de santé. Les accidents se produisent aussi bien dans les zones urbaines que rurales. Pour la grande majorité de la population, la présence de cette contamination est nouvelle, et elle ne sait pas comment y faire face. Les personnes n'ont aucune connaissance du danger. Des programmes d'éducation aux risques sont nécessaires de toute urgence pour éviter les accidents et protéger la population.

 

Que fait Handicap International contre cette contamination ?

Nous commencerons des campagnes de sensibilisation aux risques dans les districts de Mokha et d'Al Khokha, dans les gouvernorats de Taiiz et d'Al Hodeidah, ainsi que dans ceux de Hajjah, de Sanaa et d’Aden en mars. Nous aurons 8 équipes de deux agents d'éducation aux risques, chacune pour mener des séances de sensibilisation dans les hôpitaux, les écoles et les infrastructures publiques. Nous prévoyons également des séances lors de visites en porte-à-porte dans le Sud du pays et auprès des personnes déplacées dans les camps, car il y a encore d'importants mouvements de populations vers et depuis Hodeida et Taiiz.

Tout d'abord, nous présentons des images d'engins explosifs pour que le public reconnaisse les menaces. Puis nous rappelons les gestes à adopter si on voit quelque chose de suspect : arrêtez-vous, ne vous approchez pas et ne touchez pas, prévenez les autres personnes à proximité de ne pas s'approcher ou de ne pas toucher. Signalez l'endroit en plaçant un panneau d'avertissement à une distance sûre, retournez par le chemin d'où êtes venu et cherchez un itinéraire sûr. Signalez l'emplacement de l'objet aux autorités.

Le public est également sensibilisé aux endroits courants où ces objets sont le plus susceptibles d'être trouvés. Nous lui apprenons à identifier les signes et les indices qui avertissent de la présence éventuelle de munitions explosives dans leur région et à les éviter.

 

Douglas Felix Kilama est le coordinateur de l'éducation au risque pour Handicap International au Yémen. Il est basé à Sanaa.

Douglas a 20 ans d'expérience dans l’humanitaire avec une spécialisation dans l'éducation aux risques liés aux armes explosives, l'assistance aux victimes et la protection des enfants contre les groupes armés. Outre le Yémen, il a travaillé en Angola, en République démocratique du Congo, en Jordanie, en Libye, en Somalie, au Soudan, en Syrie et en Ouganda.

Il est titulaire d'une maîtrise en diplomatie et études internationales de l'Université des Martyrs de l'Ouganda et d'une licence en littérature et sciences politiques de l'Université de Makerere.

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